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Asnières : la Grande Rue
Poussez la porte, une clochette tintinnabule joyeusement pour vous annoncer.
Laissez-vous imprégner d'une odeur indéfinissable, mélange de parfums différents qui pourtant se conjuguent harmonieusement. Ça sent bon, ça sent le savon de Marseille et le cacao, le roudoudou, le coco et l'eau de Cologne, la tisane, le vinaigre...
Retrouvez votre regard d'enfant curieux et émerveillé. Sur les étagères s'empilent des boîtes joliment décorées : belles dames et leur ombrelle, enfant joufflu buvant du cacao, écolier sage croquant un biscuit, îles lointaines et cannes à sucre. Une Brésilienne vous offre le café, Monsieur Leroux sa chicorée.
Ici, un peu de mercerie, là des pyramides de savon, de savonnettes et de "senteurs" pour le dimanche. À l’abri des convoitises, les bocaux remplis de bonbons, guimauve, bâtons de réglisse... Au sol, se bousculent les bidons en fer blanc, les sacs de jute contenant les légumes secs qui voisinent avec la farine et le sucre en poudre.
Anchois et confitures se racontent des histoires de mer et de vergers. Du plafond pendent et s'entremêlent seaux, boîtes à lait, balayettes, serpillières et... martinets. Voici Auguste qui vient chercher des graines pour son potager, boire un "canon" sur un bout de comptoir sans oublier d'acheter de l'automobiline... Au fait, c'est quoi de l'automobiline ? Merci de me le dire si vous le savez.
Félix Potin a traversé le siècle. Lui et nous devons accepter que pour notre confort, nous ayons échangé un panier pour un caddy, enfermé les sublimes odeurs, annihilé les saveurs, remplacé la chaleur humaine par des bacs réfrigérés.
Ginette Bianchi